Acte 2 Tableau 2 L'après guerre, un désert Culturel ?

Publié le 26 mai 2025 à 16:02

Ci-dessus, à gauche l'ancien cinéma l'impérial rue d'Endoume, abrite un club Léo Lagrange, à droite, l'Artistic Cinéma, boulevard du Jardin Zoologique est devenue une boutique de vêtements low cost.

Ci-dessous, le cinéma le National sur le boulevard du même nom, devenus un super marché oriental, avait plus de 1000 place et a vu débuter Fenandel, Relllys et bien d'autres

A la période peu active de l’immédiate après-guerre, succède dans les années 50 jusqu'au début des années 70 une période souvent qualifiée de désert culturel. La fréquentation de l'opéra est en baisse, le théâtre Silvain abandonné, le music-hall des Variétés est transformé en cinéma et le Théâtre du Gymnase n'accueille plus que les tournées parisiennes. Simultanément, la politique de décolonisation entame un déclin économique mettant à mal les activités industrielles et de négoce.

Pourtant, il y a de grandes salles de spectacle privées et le nombre de salles de cinéma est à son apogée en 1960.

Plusieurs artistes et directeurs d'institution que nous appellerons « Les Hommes de l'Art » prennent des initiatives marquantes.

Mais, à part quelques subventions, la politique culturelle se résume à la gestion des institutions.

 

Une comtesse mécène

Elle a hérité de la très importante fortune de la Famille Noilly Prat, propriétaires des chais de la rue Paradis mais aussi de la salle de concert située en face dont on a parlé plus haut.

Au-delà du rôle qu'elle a joué pendant le seconde guerre mondiale, la Comtesse Lily Pastré (1891-1974) a pris une part déterminante dans la présence d'artistes à Marseille. Roland Petit cite avec émotion sa rencontre avec Louis Jouvet sur la terrasse de la villa de Montredon. La liste des artistes qu'elle a soutenus et accueillis dans sa villa est impressionnante. C'est aussi elle qui a amené la création du Festival d'Art Lyrique à Aix en Provence. A sa mort, elle a légué à la Ville de Marseille son château et le domaine de 130 ha qui l'entoure, château qui abritera un temps le musée de la faïence.

Avant les hommes de l'art mentionnés plus loin il y a eu à Marseille une femme de l'art.1

 

Grandeur et décadence des cinémas

Le cinéma progresse jusque dans les années 60. De 1922 a 1939, on est passé de 51 salles à 83. Puis en 1960, il y a 105 écrans dont une trentaine au centre-ville dans les salles d'exclusivité.

Inéluctablement l'arrivée de la télévision a fragilisé ce secteur basé sur une économie totalement privée. Les cinémas de quartier ferment progressivement suivis par ceux de la Canebière. Fin 90 début 2000, le nombre de salle sera au plus bas, seuls les 3 Palmes inauguré en 1997, l'agrandissement du Prado et le cinéma Bonneveine limitent ce déclin.

Une relance s’amorce avec la réouverture du Variété rénové et l'inauguration du multiplex de la Joliette en 2019 rejoint par l'Artplexe sur la Canebière en 2021, ce qui relève le nombre d'écrans à 75.

Certains ont résisté avec des hauts et des bas: le Pathé Madeleine, le Chambord, le Prado, le César, et même l’Étoile devenu un cinéma porno...

D'autres se sont transformés et retransformés : le Moulin Rouge est devenu une salle de concert après être passé par la case théâtre, le Gyptis est redevenu un cinéma après un projet de théâtre Régional des Musiques avorté puis après avoir accueilli pendant plusieurs années la Compagnie Chatot-Voyoucas. L'Alhambra ancien music-hall devenu cinéma, rénové grâce aux crédits du contrat de ville, a retrouvé sa mission de cinéma de quartier avec une très forte composante en direction de l'enfance et la jeunesse.

Des théâtres méconnus

Il existe dans ces années-là de grandes salles de théâtre et de concert. Elles comportent 1000 fauteuils et parfois plus : la Salle Prat qui ferme en 1950 après avoir accueilli les concerts classiques et les récitals lyriques après l'incendie de l'opéra en 1919 jusqu'à sa réouverture en 1924. Le Théâtre Chave construit par une famille de riches bourgeois amateurs de théâtre et le Théâtre Verdi, seront actifs jusqu'au débuts des années 60.

 

1https://archive.is/20140925114028/http://www.lamarseillaise.fr/marseille/societe/27889-lily-pastre-du-vermouth-pour-un-conte-de-fee , https://fr.wikipedia.org/wiki/Lily_Pastré 

Les Hommes de l'art

Dans les années 50-60, le développement culturel est assuré par une poignée d'hommes.

Antoine Vitez fonde le Théâtre aux étoiles en 1954 après une première programmation devant l'hôtel de ville qui cause de gros problèmes de circulation, il installera l'été un grand théâtre de plein air sur la pelouse du Palais du Pharo. Cette installation accueillera des spectacles jusqu'en 1989.

Michel Fonteyne crée le Théâtre Quotidien de Marseille, le TQM. Après avoir débuté dans des lieux modestes rue Montgrand et rue du Petit Chantier, il investit des lieux plus grands comme le Théâtre Verdi. C'est la seule compagnie de province fonctionnant de manière permanente rassemblant près de 40 personnes parmi lesquelles on trouve Antoine Vitez, Alain Cuny, Sylvia Monfort... Gaston Deferre fera transformer à son attention la salle Ceylan dans le 3e devenue maintenant Théâtre Toursky. Cette consécration arrive trop tard et le TQM y résidera seulement de 1963 à 1966 avant de cesser ses activités.

Pierre Barbizet, pianiste talentueux, est nommé directeur du conservatoire en 1963, il y développe les premières classes de jazz et de musique électro acoustique.

François Bret dirige de 1961 à 1985 l’École des Beaux-Arts et d’architecture de Marseille. Il est à l'initiative du transfert de ces établissements sur le campus de Luminy et crée les classes décentralisées d'enseignement des beaux arts dans plusieurs quartiers de Marseille.

Joseph Lazzini, chorégraphe, dirige brillamment de 1959 à 1968 un corps de ballets de 40 danseurs à l'Opéra qu’il porte à un niveau international. Le ministère de la Culture en vient à souhaiter que le corps de ballet devienne une compagnie indépendante, et devant la fin de non-recevoir de la mairie invite le chorégraphe à Paris pour y prendre la direction du Théâtre Français de la Danse1.

Antoine Bourseiller, n'ayant pas obtenu l'accueil qu'il souhaitait dans la Ville d'Aix en Provence transfère en 1969 le Centre Dramatique National du Sud Est à Marseille ou il est accueilli au Théâtre du Gymnase qu'il dirige jusqu'aux balbutiements du projet de transformation de la Criée aux poissons en théâtre en 1975.

1967, des vestiges bouleversants

Cette année-là, Gaston Deferre lance un grand projet de revitalisation du centre-ville sur l'immense terrain délaissé entre le Palais de la Bourse et la Butte des Carmes, le projet est pharaonique, il comporte des immeubles d'habitation : les Tours Labourdette, une gigantesque galerie commerciale qui traverse tout l'espace dans le prolongement de la rue Saint Ferréol et un grand parking souterrain. C'est lors du terrassement pour la création de ce parking que les vestiges grecs et romain du port antique vont être mis à jour, ce qui interrompt le projet pendant 10 ans. C'est la bras de fer entre Gaston Deferre et André Malraux ministre de la Culture. L'adjoint à la culture de la Ville Jean Goudareau menace de démissionner pour défendre la préservation des vestiges. Il obtient gain de cause et le projet finit par redémarrer donnant le Centre Bourse qui intègre le Musée d'Histoire de Marseille (MHM) et le port antique dénommé Jardin des vestiges à son ouverture.

En 2009, le Musée du Vieux Marseille installé dans la Maison diamantée après avoir séjourné dans le Palais des Arts du Parc Chanot, ferme et ses collections rejoignent celles du musée d’Histoire de Marseille .

En 2013, à l'occasion de la Capitale Européenne de la Culture, ce musée d'histoire sera réhabilité et la seconde tranche prévue de longue date verra enfin le jour2.

 

1971, léger virage à gauche

Changement d'adjoint à a culture on passe de Jean Goudareau centriste qui a pourtant sauvé les vestiges de la Bourse, mais dont la politique est très conventionnelle à Marcel Paoli radical de gauche plus sensible à l'action culturelle.

 

1: https://www.lemonde.fr/archives/article/1969/10/11/joseph-lazzini-a-l-odeon_2417709_1819218.html

2: Marseille, une autre façon de voir la ville à travers son urbanisme, Marcel Bejard et Gérard Plachenault et Revue Marseille spécial musées

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Commentaires

BERTHELOT
il y a 3 jours

merci, trop bien, on a squatté le Marceau et le Hoche
de 1988/1989 avant les Abattoirs!
Bise pierre

Gilbert
il y a 3 jours

En fait, le nom historique c'est le Palace Saint Lazare avec deux salles et plus de 1000 places. L'entrée de la deuxième salle est encore visible rue dessaix

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